A quoi sert l’exon 31 dans le remodelage des structures de clathrine dans les cellules musculaires ? – Entretien avec S. Vassilopoulos

Interview Stephane Vassilopoulos - Jul20 - Equipe Marc Bitoun

Entretien avec Stéphane Vassilopoulos, chercheur dans le laboratoire Physiopathologie & thérapie de la myopathie centronucléaire auto-somique dominante au sein de l’équipe 2 du Centre de recherche à l’Institut de Myologie, dirigée par Marc Bitoun. Avec son groupe, il s’intéresse aux protéines de la membrane des cellules musculaires et plus particulièrement à la clathrine et son implication dans les myopathies et vient de publier un article sur le remodelage des structures de la clathrine dans les cellules musculaires*.

Quelle est la genèse/contexte global du projet ?
Cette étude fait suite aux nombreux travaux de recherche menés depuis une dizaine d’années au sein du laboratoire de l’Institut de Myologie pour comprendre l’implication de la protéine dynamine 2 en interaction avec la clathrine et le rôle de cette dernière dans les cellules musculaires.
De manière inattendue, la clathrine qui forme des vésicules dans la plupart des types cellulaires y compris dans les neurones, forme des plaques dans le muscle et joue un rôle structural dans l’adhérence des cellules musculaires avec l’environnement extra-cellulaire.
Gilles Moulay, chercheur post-doctorant dans le groupe a montré en collaboration avec l’équipe de Denis Furling que les protéines qui forment ces plaques de clathrine sont soumises à un épissage alternatif important dans les cellules musculaires et des défauts dans ces voies sont impliquées dans la physiopathologie de nombreuses myopathies.

Quels sont les objectifs de l’étude ?
Les objectifs de ces travaux de recherche sont de mieux comprendre la physiologie du muscle et de comprendre la physiopathologie de la Dystrophie musculaire myotonique (maladie de Steinert, DM1) et de la myopathie centronucléaire (CNM) qui est causée par des mutations de la dynamine 2 afin de trouver des pistes thérapeutiques.
Dans la DM1, il a été constaté un défaut d’épissage important de ces protéines ce qui peut faire que les transitions entre les vésicules d’endocytose et les plaques ne se font pas correctement. Il est donc nécessaire de passer par une réorganisation génétique et des sauts d’exons.

Interview Stephane Vassilopoulos - Jul20 - 1

Quelles méthodes et protocoles ont été utilisés ?
Nous avons développé une technique de microscopie électronique qui permet de visualiser les protéines de la surface interne de la cellule.
Ce procédé consiste à casser la cellule par ultrasons, puis créer une réplique de la surface avec des grains de platine afin de pouvoir l’observer avec le microscope électronique. Grâce à la résolution nanométrique, il est ainsi possible d’observer les structures formées par les protéines en entier.

Quels résultats ont été obtenus ?
Notre singularité est d’avoir combiné cette technologie de microscopie électronique avec une autre technologie de génétique appelée le saut d’exon. Cette technique permet de supprimer le tronçon du gène (exon 31) qui pose problème afin de faire l’analyse sans cet exon. On peut alors recréer la protéine de clathrine de sorte que la cellule ne forme que des vésicules et non des plaques ce qui a un impact visible sur le muscle. La fonction des cellules s’en trouve altérée ce qui a pour conséquence un défaut dans la fonction musculaire.

Quelles conclusions peut-on en tirer et quels bénéfices ont pu être mesurés pour les patients ?
Les prochaines étapes seront d’utiliser des séquences qui forceront l’inclusion d’exons. L’idée étant de combiner plusieurs constructions ensemble pour corriger plusieurs gènes et agir sur le dysfonctionnement de clathrine dans le muscle.
Nous voulons essayer des combinaisons de vecteurs à des fins thérapeutiques pour résoudre d’autres problèmes d’épissage découverts dans les cellules de patients myopathes et améliorer la fonction musculaire.

 

* Alternative splicing of clathrin heavy chain contributes to the switch from coated pits to plaques. Moulay G, Lainé J, Lemaître M, Nakamori M, Nishino I, Caillol G, Mamchaoui K, Julien L, Dingli F, Loew D, Bitoun M, Leterrier C, Furling D, Vassilopoulos S. J Cell Biol. 2020 Sep 7;219(9). pii: e201912061. doi: 10.1083/jcb.201912061.