Covid-19 et organisation de la consultation Neuro-Myologie : 5 questions à Isabelle Coupa

Interview d’Isabelle Coupa, Cadre de Santé du service Neuro-Myologie à l’Institut de Myologie.

Qui êtes-vous et quelle est votre mission ?
Je suis Isabelle Coupa, Cadre de Santé au sein du service Neuro-Myologie à l’Institut de Myologie. Titulaire d’un DU d’Infirmière, j’ai travaillé plusieurs années dans différents services de soins à l’hôpital (cancérologie pédiatrique, psychiatrie enfants et adultes, gériatrie…). Puis, j’ai décidé de passer le concours de Cadre de Santé. J’ai obtenu un Master 1 en Management des Systèmes de Santé en juillet 2010 et j’ai rejoint le service de Neuro-Myologie dirigé par le Pr Bertrand Fontaine depuis septembre 2019.

Comment se passe votre quotidien depuis le début de l’épidémie ? Quelle organisation avez-vous mise en place pour les consultations au sein du service de Neuro-Myologie pour faire face à la crise sanitaire ?
Dès le début de l’épidémie, nous avons mené une réflexion collective au sein du service Neuro-Myologie pour mettre en place une nouvelle organisation basée notamment sur les téléconsultations afin d’espacer les consultations des patients et nous permettre d’appliquer les mesures de distanciation sociales préconisées. Notre premier objectif a été de protéger les patients et notamment ceux à risque cardio-respiratoire.

En ce qui concerne les activités de consultation, nous avons suivi à la lettre les recommandations de la cellule de crise de l’établissement et de l’AP-HP, à savoir, de déprogrammer au maximum les rdv patients sauf les cas urgents nécessitant des soins qui ne pouvaient attendre.

Pour les activités d’Hôpital de jour, nous avons favorisé la venue des patients strictement nécessaires comme ceux qui étaient sous traitement par exemple, en concentrant les visites les lundis et mardis uniquement.

A partir du 11 mai et du déconfinement progressif annoncé par le gouvernement, nous avons mené une nouvelle réflexion sur le circuit patient et leur prise en charge afin de continuer à respecter les mesures barrières et à les protéger au maximum.
Nous avons continué à favoriser les téléconsultations, et commencé à reprogrammer progressivement les patients les plus urgents pour pouvoir leur assurer un suivi cardio-respiratoire et les recevoir en hôpital de jour les lundis et mardis. En recevant un maximum de 4 patients par jour, il nous a été possible de respecter les mesures de distanciation sociale et de permettre à nos patients d’être reçus en chambre individuelle parfaitement sécurisée sanitairement, et ainsi reprendre petit à petit l’activité du service en présentiel. 

Un protocole strict a été mis en place pour les patients qui viennent en consultation. Les praticiens doivent au préalable communiquer la liste des patients qu’ils souhaitent voir, qui sont des patients fragiles sur le plan somatique, dont l’état de santé se détériore et qui nécessitent une consultation plus poussée (ECG, bilan sanguin, électromyogramme… par exemple). A leur arrivée, les patients sont accueillis par un aide-soignant qui mesure leurs paramètres vitaux, leur fait remplir un questionnaire de santé pour identifier qu’ils ne soient pas “à risque”, et les conduit en salle d’attente en leur fournissant masque et gel hydroalcoolique en attendant qu’ils soient reçus par le médecin.

Les médecins qui se succèdent sur l’ensemble de la semaine, reçoivent seulement 1 patient par heure car il faut prendre en compte le temps nécessaire et impératif de nettoyage et de désinfection entre chaque consultation selon les directives sanitaires et recommandations de l’hôpital (désinfection par bionettoyage de chaque box de consultation, des matériels, de l’ameublement et des surfaces et aération régulière des pièces).

Comment vivez-vous cette situation avec l’équipe soignante ?
Toute l’équipe s’est montrée parfaitement réactive, flexible et volontaire pour travailler en étroite collaboration, notamment avec les équipes sanitaires. 

A l’hôpital, nous sommes habitués à gérer des situations difficiles et à suivre des protocoles divers et variés, cela fait partie de notre métier de soignant ou d’encadrant.

Je tiens à souligner aussi que nous n’avons eu aucune rupture de masques ou de solutions de gel hydroalcoolique sur le site de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Quelles éventuelles difficultés rencontrez-vous ? Quel est l’impact de cette situation sur vous et vos collègues ?
La difficulté se situe davantage au niveau des patients qui peuvent parfois avoir des craintes à venir se faire soigner, notamment lorsqu’ils sont très à risque respiratoire par exemple, car ils ont peur d’être contaminés en se déplaçant pour venir à l’hôpital. C’est à nous, les équipes soignantes, de les rassurer et de faire en sorte de leur faire comprendre le “bénéfice-risque” pour eux.

Nous avons aussi à gérer la contrainte des patients venant de province pour qui les déplacements n’étaient plus possibles. Mais grâce au maillage sanitaire, nous avons pu rester en contact avec leur médecin traitant local ce qui nous permet de garder le lien à distance.

Nous sommes également beaucoup aidés par l’équipe de psychologues du service, dirigée par le Pr Marcela Gargiulo, qui travaillent tous sans relâche pour écouter, rassurer et accompagner les patients et les préparer à leur consultation de suivi.

Quel message aimeriez-vous passer ?
Je voudrais surtout faire passer le message aux patients, que leur santé est notre priorité et que nous restons à leur écoute chaque jour : le service de Neuro-Myologie est ouvert et joignable du lundi au vendredi de 9h30 à 17h00, hors jours fériés. 

Nous avons toujours tout mis en place pour accueillir nos patients dans les meilleures conditions et dans le respect total des règles et contraintes sanitaires.

Ils n’ont donc aucune inquiétude à avoir car notre attention à leur égard est encore plus soutenue dans le contexte épidémique actuel.

Personnellement, je pense que cette crise a permis de resserrer des liens entre les équipes soignantes et médicales et les patients. Et j’ai bon espoir que cela change aussi un peu le regard de la société vis-à-vis des uns et des autres.