Améliorer le diagnostic et le pronostic dans la DM1 et d’autres maladies à répétitions avec le LRS – Entretien avec Stéphanie Tomé

Stéphanie Tomé est chercheuse dans le groupe Gourdon au sein de l’équipe Repeat Expansions & Myotonic Dystrophy (REDs) du Centre de Recherche en Myologie de l’Institut. Elle a organisé la 2ème édition d’un atelier sur le thème du séquençage à longue lecture (« Long-Read Sequencing of Expanded Tandem repeats ») qui s’est tenu à Paris du 30 septembre au 2 octobre 2024. Au cours de cet atelier, les spécialistes européens et nord-américains de différents horizons ont échangé leurs connaissances et leur expertise, faisant le point sur les dernières avancées de la recherche dans les maladies à répétitions. Entretien avec Stéphanie Tomé

Dans quel contexte avez-vous organisé cet atelier ?

Je travaille sur la DM1, maladie neuromusculaire causée par une expansion de triplets CTG de caractère instable au cours de la vie du patient mais aussi entre générations successives, dont la gravité est directement liée à la taille des expansions CTG. Jusqu’à récemment, les régions répétées localisées dans le génome humain étaient difficiles à séquencer. Depuis quelques années, l’émergence du séquençage à longue lecture (ou LRS pour Long Read Sequencing) a permis de découvrir de nouvelles maladies associées à des expansions de courtes répétitions d’ADN et d’améliorer la caractérisation de la structure et de la longueur de ces répétitions, deux aspects essentiels pour mieux comprendre la variabilité phénotypique observée chez les patients atteints de ces maladies et pour améliorer le diagnostic clinique et le pronostic.

Quel en était l’objectif ?

Pour faire avancer la recherche dans ce domaine, en 2022, avec mon collègue le Pr. V. Dion, nous avons décidé d’organiser le premier atelier sur cette thématique à Londres, réunissant une trentaine d’experts travaillant sur les maladies à répétitions. J’ai ensuite pris la relève en organisant le deuxième atelier à Paris, rassemblant environ 90 participants issus du monde académique, d’instituts de recherche privés ou encore du monde associatif.

Pouvez-vous précisez quelles thématiques ont été abordées lors de l’atelier et quelles conclusions en ont été tirées ?

Côté clinique, nous avons passé en revue plus de dix maladies, dont les dystrophies myotoniques, l’ataxie spinocérébelleuse 10, la maladie de Huntington, CANVAS et l’OPDM.

Côté technique, nous avons évalué les forces et les limites de deux technologies de séquençage par rapport aux méthodes de référence et à la cartographie optique. Nos résultats, ainsi que les discussions approfondies et les expériences partagées, ont conduit à la conclusion claire et collective que le LRS offre un potentiel significatif pour améliorer à la fois le diagnostic et le pronostic de ces maladies, repoussant ainsi les limites de la médecine personnalisée.

Côté data, nous avons exploré une série d’outils bioinformatiques afin de déterminer lesquels sont les plus efficaces et les plus faciles à utiliser pour détecter les répétitions, les variantes structurelles et la méthylation de l’ADN. Plusieurs questions importantes ont été soulevées au cours des discussions, telles que la nécessité de disposer de bases de données spécifiques aux LRS et de lignes directrices actualisées en matière de bonnes pratiques pour le diagnostic de ces maladies.

Quelles sont les perspectives ?

Nous avons créé un nouveau groupe de travail chargé d’améliorer le diagnostic et le pronostic des troubles liés à l’expansion des répétitions et de progresser vers une médecine personnalisée, en tirant parti des progrès rapides réalisés dans le LRS. Une réunion de suivi est d’ailleurs prévue en 2026 pour évaluer les progrès de chaque groupe participant.

De mon côté, j’ai établi une collaboration avec des équipes espagnole et anglaise afin de mieux comprendre l’instabilité des triplets CTG dans la DM1. Avec le groupe de travail formé, nous prévoyons de rédiger une revue sur le LRS et ses applications. Enfin, nous avons pour objectif de faire une demande de grant internationale de type ERC sur cette thématique.

Rendez-vous en 2026 pour la 3ème édition de cet atelier !