Une équipe du Centre de Recherche en Myologie (CRM-UMR 974) de l’Institut de Myologie (Sorbonne Université – INSERM- AIM) a réalisé, en collaboration avec une équipe de l’université des sciences et technologies de Hong Kong, la première cartographie des cellules du muscle squelettique révélant ainsi la composition cellulaire exacte du tissu musculaire adulte, jusqu’à présent partiellement connue. Publiée dans la revue Molecular Cell, cette première scientifique, soutenue par l’AFM-Téléthon, permet de mieux comprendre la structure du muscle squelettique, d’identifier précisément l’origine de ses dysfonctionnements mais aussi d’observer plus rapidement l’efficacité des traitements.
Parmi les 600 muscles qui composent le corps humain, le muscle squelettique gère quatre fonctions principales : la motricité, le maintien de la posture, la stabilité des articulations et la production de chaleur. L’étude du tissu musculaire utilisait jusqu’alors des techniques qui n’étaient pas suffisamment performantes pour identifier l’ensemble des cellules composant le tissu musculaire. Pour connaitre la composition cellulaire précise du muscle squelettique, Fabien Le Grand, Directeur de recherche CNRS au Centre de Recherche en Myologie de l’Institut de Myologie, et son équipe, ont combiné deux technologies innovantes : la cytométrie de masse et le séquençage de l’ARN par cellule unique, une première pour l’observation d’un tissu dit solide.
Cette double approche inédite permet :
- D’identifier :
- un nouveau type de cellules, en plus des neuf connus à ce jour : les ténocytes, des cellules habituellement situées dans le tendon et dont le rôle reste encore à définir.
- de nouvelles fonctions des cellules musculaires lisses: elles peuvent donner naissance à des progéniteurs musculaires qui peuvent fusionner avec les fibres musculaires et ainsi les renforcer.
- De disposer d’une cartographie cellulaire complète et fine du muscle squelettique.
Cette cartographie, que les chercheurs mettent à disposition de la communauté scientifique, ouvre de nouvelles perspectives :
- Il sera possible de mieux comprendre l’origine d’un dysfonctionnement musculaire. Par exemple, on sait qu’un défaut de production de dystrophine est à l’origine de la myopathie de Duchenne. Mais la dystrophine ayant un rôle de renforcement de la fibre musculaire, un autre phénomène biologique est-il impliqué ?
- Les chercheurs pourront créer de nouveaux modèles murins intégrant ces nouvelles connaissances et donc analyser plus finement les mécanismes physiopathologiques impliqués, par maladies.
- Évaluer plus rapidement les effets d’un médicament. Les chercheurs pourront évaluer l’efficacité d’un traitement (thérapie génique, thérapie cellulaire, pharmacogénétique) beaucoup plus rapidement, et de ce fait à moindre coût. En effet, cette nouvelle approche combinée va permettre de tester en quelques semaines les effets d’une molécule contre 6 mois auparavant dans les modèles expérimentaux traditionnels.
« Les méthodes actuelles de purification de cellules et d’analyse de l’expression génique à grande échelle ne permettent pas de travailler sur des populations non identifiées au préalable et effacent, de fait, les variations phénotypiques entre les cellules d’un même type. Nous avons décidé de réaliser une cartographie du tissu musculaire non-biaisée (sans prérequis ni idée préconçue) pour établir une nouvelle base de connaissance du muscle squelettique à l’échelle de la cellule unique. Nos travaux montrent que le tissu musculaire est composé de 10 types de cellules mononucléées qui constituent l’environnement de la fibre musculaire. Dès à présent, nous nous attelons à trouver des populations de cellules « pathologiques » qui n’existent qu’au sein d’un muscle dystrophique ou vieillissant, pour ensuite comprendre les dérèglements cellulaires participant à la perte de fonction et/ou à la fragilité d’un muscle malade».
Désormais, les équipes s’attèlent à :
- cartographier les principales maladies neuromusculaires
- tester des premières molécules repositionnables
- tester cette double approche sur des biopsies de patients d’ici 1 à 2 ans