L’ARN messager : molécule naturelle, vaccin, cible thérapeutique

Les cellules produisent naturellement des ARN messagers pour réguler l’information génétique lors de la fabrication des protéines. Si son intérêt pour la vaccination contre les maladies infectieuses a été récemment montré, il est également étudié comme cible thérapeutique dans des maladies génétiques rares ou des maladies plus fréquentes comme certains cancers ou des maladies auto-immunes.

 

L’ARN

Qu’est-ce que l’ARN ?

Il existe plusieurs sortes d’ARN, molécules d’acide ribonucléotidique dont la structure est proche de celle de l’ADN. Ils interviennent dans la synthèse et la régulation des protéines qui sont essentielles au fonctionnement de la cellule.

L’ARN messager (ARNm) permet de copier et de faire sortir du noyau de la cellule l’information génétique afin que cette information soit traduite sous forme de protéines dans le cytoplasme de la cellule.

L’ARN ribosomique (ARNr) et l’ARN de transfert (ARNt) participent également à la fabrication des protéines au niveau des ribosomes. Les ARN interférents, découverts plus récemment, régulent la synthèse de protéines cibles les micro-ARN (miARN) et les petits ARN interférents (siARN).

 

De l’ADN à l’ARNm : la transcription

L’ARNm est fabriqué à l’intérieur du noyau. L’ADN est d’abord transcrit en ARN pré-messager, puis cet ARN pré-messager subit une série de modifications, c’est la maturation (des fragments nucléotidiques sont ajoutés : coiffe et queue poly(A) ; d’autres sont enlevés : excision des introns et épissage des exons ; des protéines s’y fixent). Lorsque la maturation est terminée, l’ARNm est transporté hors du noyau où il peut être traduit en protéines.

 

De l’ARNm à la protéine : la traduction

Une fois dans le cytoplasme, le message porté par la séquence nucléotidique de l’ARNm est traduit en une succession d’acides aminés, qui forme la protéine suivant le code génétique qui repose sur  la correspondance entre séquence de nucléotides et  acides aminés. Il est possible de produire rapidement en grande quantité une protéine donnée.

Contrairement à l’ADN qui est conservé tout au long de la vie de la cellule, les ARNm ne subsistent jamais longtemps, de quelques minutes à quelques heures.

 

Un gène, plusieurs ARNm
Un même gène peut donner naissance à plusieurs ARNm différents, en fonction des différents étapes de maturation que l’ARN pré-messager subit. Par exemple, pour le gène de la dystrophine, il existe plusieurs séquences pour débuter ou terminer la transcription sur le gène et des variations sont aussi possibles au moment de la maturation de l’ARN pré-messager. Au total, il existe près de 20 formes de la dystrophine, plus ou moins longues, avec leurs propres spécificités (on parle d’isoformes).

 

Les vaccins à ARN messager

Qu’est-ce qu’un vaccin à ARNm ?

Un vaccin à ARNm contient un ARNm synthétique, fabriqué en laboratoire dans le but de permettre à l’organisme de se défendre contre une infection.

Les ARNm utilisés dans les vaccins contre la Covid-19 codent une protéine spécifique de ce virus, la protéine Spike. Ils sont introduits à l’intérieur de vésicules lipidiques microscopiques (liposomes) capables de fusionner avec les membranes des cellules. Les ARNm pénètrent alors à l’intérieur du cytoplasme des cellules et font fabriquer la protéine Spike. L’ARNm est ensuite rapidement détruit. La protéine Spike est transportée jusqu’à la surface des cellules où, reconnue par le système immunitaire comme un élément étranger à l’organisme et développe alors une réponse spécifique contre cette protéine..

 

L’ARNm du vaccin peut-il pénétrer dans le noyau ?

L’ARNm du vaccin pénètre dans le cytoplasme de la cellule, et comme tout ARNm, il est rapidement détruit à l’intérieur du cytoplasme. Il ne peut pas pénétrer à l’intérieur du noyau car il n’existe pas de mécanisme de transport capable de faire entrer une molécule d’ARN messager dans le noyau ; il n’interagit donc pas avec l’ADN.

 

Pour aller plus loin :

 

L’ARNm intervient dans de nouveaux traitements

De nombreuses approches ciblant l’ARN messager sont à l’étude dans le domaine dans la santé. Pour les maladies neuromusculaires, par exemple :

  • Dans l’amyotrophie spinale proximale liée à SMN1 (SMA), deux médicaments déjà disponibles pour les malades, le Spinraza® et l’Evrysdi® , agissent sur la maturation de l’ARN pré-messager du gène SMN2 et augmentent la quantité de protéine SMN, qui fait défaut dans la SMA.
  • Dans la myopathie de Duchenne, plusieurs approches sont en développement pour corriger des anomalies de l’ARN pré-messager ou messager du gène DMD. La translecture du codon-stop cible spécifiquement les mutations de type « non-sens». C’est le cas de l’ataluren (Translarna®) qui a reçu une autorisation conditionnelle de mise sur le marché. Le saut d’exon modifie la maturation de l’ARN pré-messager pour rétablir la production d’une forme fonctionnelle de protéine issue du gène DMD, la dystrophine. Sept candidats-médicaments avec cette approche sont actuellement en développement. Quatre ont obtenu une autorisation de mise sur le marché aux États-Unis ou au Japon (mais encore aucun en Europe à ce jour).
  • Dans la myopathie centronucléaire due à des anomalies des gènes DNM2 ou MTM1, un essai en cours en France évalue la sécurité d’utilisation et l’efficacité du DYN101, un oligonucléotide ciblant l’ARN pré-messager DNM2.
  • Dans la glycogénose de type III, un essai clinique international évalue la bonne tolérance et l’efficacité d’un ARN messager thérapeutique codant l’enzyme manquante dans la maladie.
  • Dans la maladie de Steinert, de nombreuses approches ciblant l’ARN messager DMPK muté sont en développement. Elles visent soit à le réparer grâce au système d’édition génomique CRISPR-Cas, soit à le détruire grâce à des oligonucléotides anti-sens optimisés.
  • Dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A, les approches utilisant l’interférence par ARN ont montré des résultats prometteurs chez l’animal pour réduire la production excessive de protéine PMP22 en cause dans la maladie.
  • Dans la myopathie facio-scapulo-humérale (FSH), une approche bloquant la maturation de l’ARN pré-messager au moment de l’ajout de la queue poly(A) du gène DUX4 a montré des résultats encourageants chez l’animal.

 

Des ARN médicaments
La plupart des traitements ciblant l’ARN messager sont eux-mêmes composés d’ARN : leurs séquences sont complémentaires de la séquence d’ARN messager qu’ils ciblent, ce qui leur permet de s’y fixer et d’entrainer soit une modification de la maturation de l’ARN pré-messager, soit sa dégradation.
Il s’agit d’oligonucléotides anti-sens, des petits ARN interférents, des micros ARN, etc.

 

Cette page a été rédigée à partir de l’article ARN messager du site AFM-Téléthon.