Les mécanismes pathogéniques des myosites idiopathiques (ou myopathies inflammatoires) se précisent de plus en plus. Ils impliquent notamment les interférons (IFN), dont le rôle a été démontré par l’analyse transcriptomique de tissus ou de cellules provenant de patients atteints de myosite, laquelle retrouve une augmentation de l’expression des gènes stimulés par l’IFN (IFN stimulated genes ou ISG) : on parle de « signature interféron ».
Des signes indirects et directs d’implication
Une étude rétrospective et prospective a été réalisée entre 2013 et 2019 dans trois Centres de Référence de Rhumatologie pédiatrique français. Elle a concerné 64 enfants atteints de myopathie inflammatoire juvénile (dermatomyosite ou myosite de chevauchement). Ils ont bénéficié d’une analyse des gènes stimulés par l’interféron alpha (IFNα), ou score IFN, mais aussi d’un dosage sérique direct de l’IFNα grâce la technique Simoa (Single molecule arrays). Cette dernière méthode, encore du domaine de la recherche, utilise des auto-anticorps à forte affinité pour l’IFN ce qui permet de le détecter dans le sang et de le quantifier à des niveaux bien plus faibles que les méthodes classiques.
Les résultats de cette étude montrent dans les myosites juvéniles avec auto-anticorps anti-MDA5 :
- un phénotype clinique particulier avec davantage d’arthrites, d’ulcérations cutanées, de pneumopathie interstitielle et une atteinte musculaire plus modérée qu’en l’absence d’autoanticorps anti-MDA5
- un score IFN et un taux sérique d’IFNα beaucoup plus élevés au moment du diagnostic et qui diminuent ensuite sous traitement, comme le taux d’auto-anticorps anti-MDA5
L’IFNα aurait donc un rôle systémique important dans ces myosites juvéniles, en particulier dans le sous-groupe des patients qui produisent des anti-MDA5.
Une implication différenciée
Une équipe de chercheurs américains a pour sa part étudié les biopsies musculaires de 119 personnes atteintes d’une myopathie inflammatoire et de 20 personnes indemnes de ces maladies. Cette étude a mis en évidence une signature interféron différente selon la myosite :
- les gènes stimulés par l’interféron de type I sont plus activés dans la dermatomyosite que dans le syndrome des anti-synthétases, la myopathie nécrosante auto-immune et la myosite à inclusions
- les gènes stimulés par l’interféron de type II sont davantage activés dans la dermatomyosite, le syndrome des anti-synthétases et la myosite à inclusions, et moins dans la myopathie nécrosante auto-immune
Ces avancées laissent espérer de pouvoir utiliser les IFN comme biomarqueurs diagnostiques et d’activité des myosites. Elles ouvrent également des perspectives thérapeutiques avec, par exemple dans la dermatomyosite réfractaire, la possible utilisation de médicaments qui ciblent l’IFN I comme les inhibiteurs de TANK-binding kinase 1 (TBK-1) ou ceux des janus kinases (JAKi).